La lettre de l'Institut Renaudot N°26



Sommaire

  • Editorial : Un "bug communautaire" pour l'an 2000 ?
  • Santé communautaire : regard d’une habitante
  • Les ateliers de l’avenir
  • Le concept de participation
  • Secrétariat Européen des Pratiques de Santé Communautaires
  • Centre de documentation
  • Les figures urbaines de la santé publique, enquête sur des expériences locales
  • Les Ecoles de Consommateurs





    Editorial : Un "bug communautaire" pour l'an 2000 ?
    Marc Schoene


    Tout laisse à penser que la question de la Santé communautaire fait enfin son chemin en France.
    L'intérêt suscité par la Charte élaborée et diffusée par l'Institut et la branche française du Secrétariat européen des pratiques de santé communautaire a de quoi réjouir. Nous recevons régulièrement des demandes d'informations, des commandes d'exemplaires de Charte, des avis et des sollicitations diverses.

    Le très récent congrès tenu à Lyon par la coordination nationale des réseaux a bruissé de santé communautaire à travers les exposés de plusieurs congressistes.

    De nombreuses actions menées au quotidien en région parisienne ou en province s'efforcent de développer des actions innovantes empruntant tout ou partie des éléments constitutifs de la santé communautaire.

    S'appuyant ici sur l'initiative d'une association, ailleurs celle de professionnels, d'une Municipalité, d'une mutuelle, d'un centre de santé, des actions s'intitulant communautaires, empruntant tout ou partie des éléments constitutifs de la santé communautaire, des actions de plus en plus nombreuses cherchent à mieux répondre aux besoins complexes de santé globale générés par notre société.

    Cette efflorescence réelle de pratiques locales nouvelles ou atypiques tranche avec les pesanteurs professionnelles et institutionnelles , les corporatismes, avec les logiques strictement comptables, avec les cloisonnements disciplinaires, avec un système de santé encore accroché au curatif, à l'individuel, avec les résistances qui en découlent à accepter la place de la société et des citoyens dans un concept et une pratique de santé globale repensés.

    Dans le monde de l'économie sociale, de la santé publique, des intervenants divers en santé communautaire, il devient évident qu'il manque des lieux de rencontres entre acteurs, des lieux d'échanges voire d'expertise des pratiques, des lieux qui aideraient à mieux visibiliser les acteurs et actions de santé communautaire éparpillés en France; création de lieux visant à préciser, renforcer, améliorer le concept et surtout les pratiques de santé communautaire, et en les visibilisant, leur donner une reconnaissance et une autorité plus forte dans les évolutions en cours.

    Et si les pratiques de santé communautaire, par leur dynamisme, leur diversité, leurs efficacité devenaient un "bug" qui déstabilise l'actuel système sanitaire et social qui peine à se transformer ? C'est tout le bien qu'on peut souhaiter à ce bug là !

    C'est tout le sens des initiatives de l'Institut pour ses prochains mois : séminaire de santé communautaire, catalogue de nos formations, rencontre nationale sur les pratiques de santé communautaire au premier trimestre 2000...


    Dernière Nouvelle
    Le colloque "Croisements des pratiques de santé communautaire" aura lieu les 29 et 30 Janvier 2000 dans la ville de Grande Synthe (Pas-de-Calais)


    Santé communautaire : regard d’une habitante
    Christine Delory


    Depuis 1997, la ville de Choisy le roi a mis en place avec l'association MDSL (Mouvement pour le Développement Social Local) dans le cadre de la santé communautaire, les ateliers de l'avenir sur les quartiers "Navigateurs et Lopofa."

    De quoi s'agit-il ?
    D'une approche des questions de santé à partir d'un quartier, dans un cadre progressif avec l'intervention des habitants. Il s'agit avant tout d'une expérience de santé. Celle-ci passe par la mise en oeuvre de techniques relatives à l'établissement du bien-être des personnes. Il est clair que les problèmes l'ourds tels que l'alcoolisme, l'état psychologique, l'état de santé général seront mieux abordés par les gens du quartier de l'expérience préparatoire élaborée dans le cadre de la santé communautaire.

    Les habitants travaillent en étroite collaboration avec les différents partenaires tels que l'OPAC (bailleur), la CAF, le centre médico-social. Lors de la première réunion, les habitants ont voulu que le nom des "ateliers de l'avenir" soit changé en "ateliers de l'espoir", car le but de ces ateliers est de transformer tous les points négatifs que les habitants semblent avoir sur le quartier en des points positifs.

    A ce jour, les trois ateliers suivants ont été créés :
  • Groupe fêtes et convivialité : animation sur les quartiers, sorties bateaux-mouches, fêtes de Noël avec père Noël (préparation du goûter par des habitants), goûters-crêpes avec spectacles et repas couscous.
  • Groupe journal : à ce jour, quatre éditions d'un journal de quartier ont vu le jour. C'est un journal de communication qui est le reflet de ce qui se passe sur le quartier.
  • Groupe environnement : participation de plantation de fleurs avec la maison de l'enfance, préoccupation des questions de sécurité et de mal-être, projet de préparation de vacances et de jardin communautaire.

    Les ateliers ont permis de mobiliser une centaine de personnes. Ceux-ci doivent se poursuivre car ils ont permis à des personnes de sortir de chez elles, de s'impliquer dans la vie de quartier. Les prochains objectifs consistent en la mise en place, avec les professionnels, d'un projet d'amélioration sur l'accès aux soins et des actions de soutien aux personnes en souffrance dans les domaines de la dépendance à l'alcool, à la drogue et aux médicaments. L'originalité de la démarche est que les habitants sont aussi acteurs dans ce projet. En effet, le domaine médical est très "professionnalisé et institutionnalisé". Les habitants et les professionnels se forment ensemble par un échange de savoir et dans la reconnaissance mutuelle des capacités de chacun.



    Les ateliers de l’avenir
    MDSL-Intervention

    En 1954, Robert Jungk présente une méthode de travail appelée " Atelier de l'Avenir - des chemins pour revivre la démocratie". Le Mouvement pour le Développement Social Local a a repris cette méthode qui énonce la thèse que la population souvent silencieuse a beaucoup de choses à dire sur son quartier, sa ville, ses besoins, ses expériences. Elle constitue un gigantesque réservoir d'idées.

    La technique des Ateliers de l'Avenir est un outil de dynamisation et de création de lien social. Elle permet la confrontation d'idées entre élus, techniciens et habitants dans une finalité de "Construire ensemble". Dans ce type d'Atelier, chaque personne est présente avec sa spécificité, sa compétence et sa responsabilité. Les habitants ont une place centrale dans la mesure où ils doivent viser l'organisation d'un mieux vivre sur leur quartier. En outre, elle doit aider les habitants à sortir d'une certaine passivité pour devenir des sujets créatifs, des producteurs d'idées en l'occurrence des citoyens à part entière.

    Les Ateliers de l’Avenir tels que nous les mettons en oeuvre ont été mis au point par Maryse PEGOURIE et Hugo SWINNEN. C’est une technique dynamique qui permet de passer de l’expression des difficultés et du mal-être à une phase d’utopie créative pour déboucher sur des projets concrets. Des ateliers de travail prennent donc le relais de la séance d’Ateliers de l’Avenir pour que se mette en place une dynamique de changement dans laquelle les habitants acteurs sont accompagnés par les travailleurs sociaux du quartier.

    Une technique d’animation créatrice de dynamisme
    Elle se déroule en trois phases :
  • les participants sont tout d’abord invités à formuler des critiques et remarques sur " ce qui ne va pas ". Ils les classent par thème et résument le thème en une phrase négative (phase critique).
  • Le deuxième temps est consacré au rêve : ils émettent des propositions de l’idéal qu’ils imaginent pour leur quartier, sans censure d’ordre pratique (phase de rêve). Ils classent aussi leurs idées par thème.
  • La phase créatrice est la plus constructive : il s’agit de revenir au principe de réalité pour chercher comment on peut progresser vers l’idéal. Les participants cherchent à déterminer des objectifs et à envisager des moyens pour y parvenir.

    A l’issue de cette troisième phase, des ateliers de travail peuvent se constituer pour approfondir chacun des thèmes et élaborer des projets pour les actions prioritaires.

    L’organisation préalable
    Des réunions de préparation avec un groupe d’habitants et des travailleurs médico-sociaux qui les accompagnent permettent de choisir le thème des Ateliers de l’Avenir. C’est à ce " groupe moteur " qu’il incombera en grande partie de rassembler une part plus large de la population .

    En général, un tract explicatif est rédigé au cours de la dernière rencontre de cette phase de préparation afin d’offrir un support écrit, et de permettre une diffusion plus large ainsi qu’une mémorisation de la date.

    La participation d’élus et de représentants des institutions (décideurs et techniciens de terrain) est très importante pour que s’opèrent une prise de conscience et un engagement collectifs. L’implication des politiques et des institutionnels se révèle souvent déterminante dans la réalisation des projets qui se mettent en place à la suite des ateliers.

    Le déroulement des Ateliers de l’Avenir
    Les trois phases doivent se dérouler de façon suivie et rapprochée ; il est cependant souhaitable de pouvoir faire une pause entre la phase négative et les deux suivantes.

    Ils peuvent se prévoir sur deux journées complètes avec déjeuner pris en commun, ou sur une soirée puis une journée.

    Le fait de prendre un repas en commun permet d’instaurer une grande convivialité, ou plutôt de renforcer la convivialité des relations qui ne manquent pas de s’installer dès la première phase.

    La rédaction d’un compte-rendu complet, reprenant intégralement toutes les phrases notées sur les post-it et les synthèses réalisées, constitue un élément de solidarisation du groupe en même temps qu’une trace utile pour sa mémoire et son évaluation ultérieure. Le livret relié avec les photos reste la mémoire de l’événement.

    Les ateliers de travail
    Les ateliers continueront à travailler sur les thèmes retenus. Habitants et travailleurs sociaux pourront ensemble élaborer des projets et les réaliser.

    Il est éventuellement possible d’élargir les groupes pour que d’autres habitants puissent s’associer à la démarche, et les intervenants sociaux du quartier seront invités à se joindre aux groupes. de travail.

    Dans un premier temps, les différents ateliers se réuniront ensemble afin que chaque participant puisse choisir son groupe de travail. Il est possible aussi que des ateliers ayant des objectifs proches fusionnent.
    Par son aide méthodologique, le MDSL-Intervention accompagne et soutient la démarche, dans toutes ses étapes.

    L'équipe du MDSL-Intervention est composée de :
    Marie-Renée Bourget-Daitch, Directrice
    Yasmina Branki, Assistante de direction
    Véronique Billaud, Chargée de mission
    Candida Ferreira-Leconte, Chargée de mission
    Christophe Jibard, Agent de développement
    Bernard Pissarro, Responsable pédagogique
    Daniel Talleyrand, Chargée de formation en santé publique et humanitaire

    a Le Mouvement pour le Développement Social Local - Intervention (MDSL) mène des actions qui ont pour but :
  • de permettre aux acteurs locaux de développer leurs savoirs, leurs savoir-faire et leur capacité à vivre ensemble,
  • d'impulser sur un territoire des projets qui partent des préoccupations des habitants, des élus et des acteurs locaux,
  • d'accompagner et soutenir ces projets en valorisant les ressources, les potentialités et les forces vivres locales sans jamais se substituer à elles.



    Le concept de participation
    Carmen Garcia Sanchez

    Le petit Robert définit la participation comme le simple fait de " prendre part " à une activité sociale. Il faut distinguer la participation comme état (être bénéficiaire plus ou moins passif) ou comme action et engagement (planifier, mettre en œuvre, évaluer des programmes de santé).

    La charte d’Ottawa pose comme principe que la promotion de la santé procède de la participation effective et concrète de la communauté pour atteindre un meilleur niveau de santé... La pratique de la participation répond donc à un besoin de faire évoluer les pratiques en matière de santé dans un souci d’efficacité.

    Plusieurs modèles de la participation existent
  • Pour l’approche médicale, la santé est l’absence de maladie. La participation communautaire est dans ce cas un ensemble d’activités entreprises par des groupes de gens sous la direction des professionnels médicaux pour réduire la maladie chez l’individus et améliorer l’environnement général.
  • Pour l’approche des services de santé, la santé est le bien-être physique, mental et social de l’individu. La participation communautaire est la mobilisation des gens de la communauté pour qu’ils prennent un rôle actif dans la délivrance des services de santé.
  • Pour l’approche du développement communautaire, la santé est une condition humaine qui résulte du développement social, économique et politique, et la participation communautaire est l’implication active des membres de la communauté dans les décisions destinées à améliorer cette condition.
  • Dans certains modèles les décideurs sont surtout les professionnels. Dans l’approche du développement communautaire, ce sont les membres de la communauté qui prennent les décisions.
  • Pour se mettre en place, la participation nécessite un changement des attitudes, des pratiques et des représentations chez les membres de la communauté et chez les " experts ". Les personnes et les groupes doivent être reconnus comme détenteurs d’un savoir et de compétence sur la santé, et libres de faire leurs propres choix en matière de bien-être.
  • La participation communautaire est le produit de changements continus, un processus dynamique qui permet aux individus d’intervenir dans les décisions institutionnelle (définition des priorités, prise des décisions, mise en place des actions, évaluation permanente du fonctionnement, ...) C’est un processus relativement lent par lequel la communauté, à travers ses formes d’organisation, change la distribution du pouvoir.

    Le pouvoir est au cœur de la participation communautaire. La participation est synonyme de partage du pouvoir, d’échange de savoir. Elle suppose l’accès illimité et permanent aux informations sur la santé alors que des rapports de pouvoir bloquent l’échange et la communication, et conduisent à des situations d’incompréhension mutuelle et de soumission de la population aux professionnels.
    L’échange des savoirs, la confrontation des opinions amène à des oppositions ou des conflits. La pratique de la négociation, et la reconnaissance mutuelle, permettra de passer de la revendication à une démarche de coopération.

    La participation nécessite des habitants et des professionnels acteurs selon Claude Neuschander. " est acteur, celui qui a la capacité et la volonté de prendre des initiatives pour faire évoluer l’organisme ou le groupe auquel il appartient. A contrario, le figurant assure la continuité des choses et non l’évolution ".



    Secrétariat Européen des Pratiques de Santé Communautaires



    Centre de documentation
    Samia Mammer

    L'éducation, pratique de la liberté.
    Paolo Freire, Lusigny-sur-Ouche : ASDIC Editions W Mâcon, 1998. - (Décision locale). - 240 p.
    Réédition en fac-similé, à titre non lucratif et hors commerce, de cet ouvrage autrefois publié par les Editions du Cerf et resté longtemps introuvable.
    Contact : Asdic. Cour des entreprises 21360 Lusigny-sur-Ouche
    Tél 03 80 20 10 47 Fax 03 80 20 17 00

    Education-Santé : le CD-Rom.
    Paris, ADOSEN (Association Nationale d'Education à la santé et à la solidarité) ; MGEN (Mutuelle Générale de l'Education Nationale), 1998
    L'enfance et l'adolescence doivent s'accompagner d'une véritable éducation à la santé venant des parents et de tous les membres de la communauté éducative. Ce CD-ROM, au travers de dizaines d'animations interactives, de centaines de pages de questions-réponses et de documents imprimables, au travers de nombreux témoignages de médecins, experts en santé publique, d'enseignants, de chefs d'établissement, d'infirmières, d'assistantes sociales, d'adolescents... propose une démarche et des recommandations utiles pour la prévention et la protection de la santé des jeunes.

    Contact : ADOSEN. Tour Maine Montparnasse 33, avenue du Maine, 75015 Paris
    Tél 01 45 38 71 93 Fax 01 43 20 33 87

    Prévention communautaire et réseaux inter-institutionnels.
    Evaluation des mesures de la confédération destinées à réduire les problèmes liés à la toxicomanie.

    Thierry Devos, Jean-Pierre Gervasoni, Françoise Dubois-Arber, Lausanne : Institut Universitaire de Médecine Sociale et Préventive, 1997. - 187 p.
    Dans le cadre de la promotion des mesures dans le domaine de la prévention secondaire des toxicomanies, l'Office Fédéral de la Santé Publique (Berne) a soutenu un certain nombre de projets relevant de l'"approche communautaire". L'objectif de la présente étude est de dégager, d'analyser et de comparer certaines dynamiques à l'oeuvre dans ces projets. Trois aspects ont plus précisément été traités : 1) les dynamiques par lesquelles les projets s'initient 2) leur phase de réalisation 3) les enseignements que l'on peut tirer sur leur base.
    En consultation à l'Institut Théophraste Renaudot

    Contact : Dr Jean-Pierre Gervasoni
    Tél. 00 41 21 314 72 92 (Lausanne)
    Fax : 00 41 21 314 72 44

    Opportunité et risques : les tendances de l'exclusion en Europe. Dignité humaine & exclusion sociale.
    Katherine Duffy, Conseil de l'Europe, 1998. - 226 p.
    Parmi les thèmes abordés, citons plus particulièrement l'éducation, le logement, l'emploi mais également la protection sociale et la santé. Le chapitre sur la santé étudie à la fois l'évolution de la mortalité et celle de l'accès aux soins, dans un contexte où, nombreux sont celles et ceux qui ont des ressources matérielles et sociales très limitées, et où les gouvernements encouragent les populations prendre plus en plus en mains leur propre santé.
    En consultation à l'Institut Théophraste Renaudot

    Sondage : santé et suivi sanitaire.
    Paris, Croix Rouge Française, 1998
    A l'occasion du lancement du Plan Hiver 1998/1999, la Croix-Rouge Française a demandé à la Sofrès Médicale de réaliser une étude sur le niveau d'implication des français, et en particulier des médecins généralistes, face aux problèmes de santé que rencontrent les personnes en difficulté.

    Contact : Sophie Baudin Tél 01 44 43 11 21



    Les figures urbaines de la santé publique
    Enquête sur des expériences locales
     a

    Les 21 et 22 janvier derniers se tenait au CNRS à Paris, un colloque sur le thème "Politique des corps et gouvernement des villes. La production locale de la santé publique". Prolongement d'un programme de recherche lancé en 1995 par le Pirvilles, il en présentait les principaux résultats, discutés par des historiens et des sociologues, parmi lesquels Georges Vigarello et Robert Castel. Ce programme, coordonné par Didier Fassin a donné lieu par ailleurs à la publication d'un ouvrage collectif intitulé "Les figures urbaines de la santé publique", dont nous reproduisons ici l'argument.

    Au cours de la période récente, la santé publique a connu un certain renouvellement de ses objets et de ses pratiques à travers son inscription territoriale dans la ville. Dispositifs visant à favoriser l'accès aux soins des populations paupérisées, politiques de réduction des risques pour les toxicomanes, programmes de santé dite communautaire dans des quartiers en déshérence, autant de manifestations de ces transformations par lesquelles l'action publique locale semble se déployer sur le terrain sanitaire pour y affronter des problèmes de société.

    Ce faisant, la santé publique locale s'est en bonne part affranchie des limites traditionnelles de la médecine et parfois même de la tutelle des médecins. ingénieurs sanitaires, assistantes sociales, éducateurs de rue, animateurs de quartier, urbanistes, enseignants, policiers, juges, administratifs, élus et, bien sûr, habitants des villes en sont les acteurs, à côté des spécialistes de la santé. De nouveaux agencements de compétences et de pouvoirs, de pratiques et de savoirs, de valeurs et de normes se dessinent ainsi. Ces reconfigurations de l'espace local de la santé publique, les auteurs de ce livre les ont étudiées à travers une recherche menée dans huit villes de France (Béziers, Brest, Marseille, Metz, Nancy, Rennes, Toulouse, Tours) où des expériences multiples ont été recueillies et analysées. L'approche pluridisciplinaire, réunit politologues, sociologues, anthropologues et géographe qui en proposent une lecture ouverte.

    Comment peut-on comprendre cette effervescence ? La "nouvelle santé publique", proclamée ici et là, est-elle une réponse, dans l'espace local, à ce que l'on désigne parfois comme la "nouvelle question sociale"? L'examen attentif des situations observées invite ici à une certaine prudence dans l'interprétation. Plutôt que l'accomplissement ultime d'un "bio-pouvoir" que la modestie de ses moyens et de ses réalisations rend improbable, cette politique des corps, qui se met en place dans les villes contemporaines, n'est peut-être au fond que le dernier langage du social.

    sous la direction de Didier Fassin, Paris, La Découverte, 1998 (Recherches)
    Didier Fassin, qui a coordonné cette recherche dans le cadre du Programme Villes du CNRS, est anthropologue et médecin. Professeur de sociologie à l'Université Paris-Nord, il y dirige le Centre de Recherche sur les enjeux contemporains en santé publique.
    Les autres contributeurs de l'ouvrage sont : Gonzalo Alvestégui, Serge Clément, Marcel Drulhe, Isabelle Féroni, Patrick Hassenteufel, Blanche Le Bihan-Youinou, Patricia Loncle-Moriceau, Anne Lovell, Michel Lussault, Jean Mantovani, Philip Milburn, Monique Membrado, Pierre Valarié, Antoine Vion.



    Les Ecoles de Consommateurs
    Danièle Gilis

    Des femmes qui "sortent de leurs habitudes ménagères et de leur solitude", des chômeurs qui "ne parlaient plus à personne et qui osent prendre la parole dans une réunion publique sur la réhabilitation de leur quartier", des "mères de famille qui modifient les modes de cuisson dans la préparation des repas", des voisines qui échangent entre elles sur les dangers de la carte COFImachin... C'est tout cela les Ecoles de Consommateurs.

    La première Ecole des Consommateurs est née à Grande Synthe en 1988. Cette expérience, modélisée par le Conseil Régional du Nord-Pas-de-Calais, s'est multipliée dans la région et même semble-t-il jusqu'en Seine-Maritime.
    Les objectifs, annoncés dans la brochure de présentation de l'Ecole des Consommateur sont : "sortir de l'isolement, améliorer la vie au quotidien, se former et s'informer, être citoyen à part entière, développer ses potentialités, communiquer, s'épanouir et s'affirmer, se donner les moyens de réussir". Elles "mettent en oeuvre une pédagogie active, basée sur la valorisation des personnes, de leurs propres savoirs et "savoir faire", en suscitant à toute étape une démarche d'acteur".

    Le Conseil Régional pilote ce dispositif par son Centre Régional de la Consommation (CRC) et finance les postes d'animatrices dans des locaux mis à disposition par les communes. Différents partenaires participent aux formations organisées, en fonction des demandes des participants.

    Deux jeunes réalisateurs de la région Patrice Deboosere et Gilles Deroo ont pendant trois mois suivi le travail d'une Ecole et ont filmé avec beaucoup de sensibilité les participants, en réunion et à leur domicile. Vous pouvez vous procurer ce film "Du Beurre dans les Epinards", coproduit par Equipage-Ecran, C9 Télévision et le CRC au centre de documentation de l'Institut Théophraste Renaudot.